Envie de partir ?
« Je me suis assis à la terrasse d’un café, à l’angle de la rue d’espagne et de la rue du paradis. Le vent tiède flottait et soulevait les robes des filles et des femmes qui passaient en souriant. Le serveur était grand et brun et son visage m’était sympathique. Il m’a servi une caïpirinha, puis je me suis étiré, j’ai fermé les yeux et quand je les ai ouverts de nouveau, il était toujours là, debout, le plateau posé au bout des doigts. J’ai fouillé mes poches et je lui ai laissé un généreux pourboire. Je me suis basculé vers l’arrière et j’ai encore fermé les yeux. J’entendais le soleil qui brûlait mollement ma peau et le vent qui serpentait entre les pavés irréguliers et les talons des filles qui remontaient de la place du marché alors je les imaginais, nues couchées dans les herbes hautes d’un bas-côté. Puis une bouche m’a embrassée, j’ai relevé la tête, la fille était entre le soleil et moi et sa peau dégageait les parfums métissés des caraïbes. Elle m’a regardé un long moment et elle est repartie, après avoir achevé ma caïpirinha. »
Ce texte n’est pas une histoire vécue. Ce texte n’est pas le début d’un roman ou d’une nouvelle. Ce texte n’est pas particulièrement bien écrit. Ce texte n’est pas particulièrement drôle ou émouvant ou haletant. Ce texte je viens de l’écrire. Ce texte n’est rien. Il est un remède.
Je ne vais pas vous parler de climat infect ou de dépression saisonnière qui s’étend jusqu’au mois de mai. Je vous parle d’un alignement de mots, qui, mis bout à bout, font un texte médicamenteux. En tout cas, ça marche sur moi. Terrasse, soleil, vent, café, filles, doigts, robes, tiède, peau, pavés, herbes, parfums, caraïbes, caïpirinha, baiser. C’est niais. Totalement. Mais ça fait du bien. Putain ça fait du bien.
Merci qui ? Merci docteur.