Est-ce que ce monde est sérieux ?

Parfois je me lève le matin et je me demande, en chantant : « Est-ce que ce monde est sérieux ? »

Et je me demande principalement ça quand je pense à ma situation : j’essaie de vivre de ce que j’écris alors je réfléchis au meilleur modèle à adopter pour tenter de s’en sortir. Je réfléchis aux différentes solutions possibles: j’exploite une piste, puis une autre avant peut-être de trouver la bonne. Le bon filon. Le truc rentable. Mais tout cela prend du temps. Et quand on ne gagne pas un €, le temps, c’est forcément de l’argent. Et le temps en littérature, c’est affreusement long : la publication d’un premier roman – sa publicité – sa sortie du néant absolu – la publication d’un deuxième roman – via un autre éditeur (et baf, 3 ans de vie se sont écoulés).

Il faut dire les choses comme elles le sont cher mon lecteur : aujourd’hui, si j’étais seul et sans « subside », je ne survivrais pas et donc je ne pourrais pas tenter d’exploiter différentes pistes. Et je ne pourrais pas (n’aurais pas pu) écrire autant, parce qu’écrire 4 romans et plus de 30 nouvelles en 2 ans, c’est une réelle chance mais aussi l’opportunité de s’améliorer dans ce que je considère comme « mon métier qui ne me rapporte pas un kopek ». 

Alors parfois, quand je découvre le public dans une foire du livre et qu’il me parle davantage de mon âge que de ce que j’écris, de mon apparence plutôt que de Trois ombres au soleil, je me dis qu’il y a un gouffre entre mes attentes et le monde réel qui lit des livres. Parce que je ne serai jamais rien (et je ne pourrais forcément pas vivre de l’écriture) sans un public, lequel public me trouve étonnament jeune pour camper Marie, une vieille femme ennuyée. Alors je me demande ce qu’il faudrait faire pour augmenter ma crédibilité et attiser la curiosité du public pour ce premier roman. Parce qu’en réalité il ne s’agit que de ça. De faire lire les gens. Et puis quand je repense à ce vieil homme qui est venu face à mon stand me demander mon âge avant de me raconter les débuts de l’histoire financière sans jamais s’intéresser aux piles de romans étalées sur les nappes blanches, je me demande, en déchantant : Est-ce que ce monde est sérieux ?

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