J’écris aussi, parfois, pour l’argent, mais alors un peu, un tout petit peu d’argent.
Si toi aussi tu aimes écrire cher mon lecteur et que tu n’as encore jamais rien publié, laisse-moi te dire ceci, j’espère que tu le fais pour les bonnes raisons : c’est vital, urgent et ça n’a jamais été écrit avant (bon, soyons humbles sur ce dernier point, on ne peut pas tout lire, mais disons que ça n’a jamais été lu avant). Je dis cela en supposant que tu souhaites le publier et le faire lire, je n’irais pas m’immiscer dans la rédaction de ton journal de bord (je lis en ce moment un agréable roman sur le sujet, Le mal de Montano de Enrique Vila Matas). Parce que si l’argent est ton moteur, tu t’es trompé de bord. Je ne peux pas t’assurer avec certitude que tu échapperas au succès et à la gloire, mais disons que les probabilités sont contre toi. (Et moi qui ai étudié le journalisme, je peux te dire que je cumule les expériences non-rémunératrices et pourtant, paradoxe ultime, j’ai la conviction ténue que je deviendrai riche. Comment ? Nul ne sait). Ecrire ne rapporte rien. Jouons franc jeu, pas de secret entre nous. Enfin, si, ça rapporte un peu. Mais alors un tout petit peu. Maestro. Les chiffres. Au moment des déclarations fiscales, les droits d’auteur sont arrivés et donc voici le bilan de 2018 : 47 EUR pour la publication du roman (à hauteur de 5% du prix du livre, 4 ans après sa parution) et, surprise, 68 EUR pour les différents textes primés et exploités sur short-edition, via leurs différentes plateformes et surtout leurs distributeurs placés un peu partout en Francophonie, dans les gares, les hopitaux, les salles d’attente et les bibliothèques.
Alors, je ne pense qu’on puisse dire de moi, même lorsque je suis loin, le dos tourné, ivre, je ne pense pas qu’on puisse jamais dire que je suis vénal. L’argent n’est pas mon moteur – et heureusement parce que je serais alors fabuleusement mal orienté. Mais comme il semble que je me consacre depuis maintenant près de 11 ans à l’écriture, que c’est une partie importante et intégrante de ma vie, que deux nouveaux manuscrits attendent d’être publiés, que je planche déjà sur un prochain roman que je n’écrirai que lorsqu’un des manuscrits aura la certitude d’être publié, autant tenter de tirer profit de cette activité pour laquelle on m’a déjà, à un moment ou à un autre, reconnu un talent certain. Petite parenthèse, pour les premiers romans, c’est surtout à cela que servent les prix littéraires, à indiquer à un homme qui s’installe souvent seul derrière son clavier, sans autre certitude que sa conviction, qu’il ne s’est pas complètement fourvoyé sur la route de l’écriture, de la littérature, du succès, du pognon, des Goncourt, ….. L’enthousiasme, tu comprends, cher mon lecteur. Bref, que des gens qu’il n’a jamais rencontrés reconnaissent de manière formelle et définitive les qualités d’un de ses romans et l’homme en question s’en trouvera conforté dans ses choix, rassuré dans sa longue démarche de construction d’une oeuvre (un peu pompeux pour dire qu’il continuera d’écrire).
Bref, j’écris toujours. Alaors autant que ça rapporte. Même un peu. Ne fut-ce qu’un tout petit peu. Je pourrai inviter quelques proches à manger une gaufre (fais-toi plaisir sur les toppings, je régale) et leur parler de littérature et d’indulgence devant le temps que tout cela prend. J’aurai encore gagné quelques années de répit. En réalité, ce n’est pas le leur, mais le mien de répit que je recherche .
Et si la littérature classique prend du temps à se construire, à être publiée, à se vendre (mais dure aussi plus longtemps), la littérature courte de short-edition colle davantage au rythme de notre temps. Rapide à écrire, à lire, à consommer et à oublier (soyons honnêtes, cela nous fera gagner du temps). Mais aussi davantage rémunératrice l’an dernier que la dite littérature classique, alors que j’ai proposé peu de textes à short-Edition et que ce sont des oeuvres de 2015 ou 2016 qui m’ont rapporté autant (on se calme, c’est 60€ mon vieux).
Bref (encore), comme il semble que je ne lâche pas l’affaire avec la littérature (ce n’est – malheureusement ? – pas dans mon caractère), que je continue d’écrire, de corriger et de croire, autant que ça soit rémunérateur, même un tout petit peu (je l’ai déjà dit, cela, ne serais-je pas un vénal au final ?)
Et short-edition me semble être une option aisée. Regardons les choses en face, il ne faut chercher aucune retombée du côté artistique, à part si Gaston Gallimard ou Robert Laffont (qu’ils reposent en paix) tombaient par hasard sur un de mes textes dans la salle d’attente de leur dentiste et se mettaient à chercher fiévreusement à me contacter via les réseaux pour me commander un roman. Là, d’accord. Mais en réalité : Non. Et la plupart des lecteurs sont soit des auteurs du site qui cherchent à venir quémander un peu de passage sur leur propre texte et puis surtout il y a toi, cher mon lecteur. Rien qui ne permette de creuser un sillon ou nouer des contacts utiles dans le monde littéraire. Mais les textes s’écrivent en une matinée avec d’aller travailler. Et après, je n’appelle même plus au vote. Ce n’est pas pour rien que les élections ont lieu tous les 4, 5 ou 6 ans, c’est parce que toi et moi, nous sommes épuisés des appels au vote pour un tel ou un tel. Chacun a de bonnes raisons à faire valoir. Moi aussi. Et je vois bien que ça ne t’enthousiasme plus autant. Je comprends. Une forme de lassitude qui ne se dit pas. Donc je te propose simplement quelques minutes de lecture. Et je compte sur le choix du jury pour devenir lauréat. Si je ne le deviens pas, c’est simplement une micro-blessure égotique supplémentaire. Non, pas de pression sur tes épaules cher mon lecteur. Tu es libre.
Le grand mingalabahr, 4 minutes de lecture pour un concours consacré aux 500 ans de la mort de Leonardo Da Vinci.
La forêt, 7 minutes de lecture, sur la guerre et les hommes qui y survivent comme ils peuvent, libérés des conventions.
La littérature nous enrichit tous :))