J’ai (de nouveau) abandonné trois de mes enfants

Cher mes lecteurs, je dois vous faire un terrible aveu. J’ai de nouveau abandonné trois de mes enfants. Mais pour bien comprendre tout cela, voici le début de l’histoire.

La littérature utilise souvent quelques clichés bien sentis pour parler des romans. Et parmi ces clichés, celui-ci, déjà lu  cent fois : « Ce livre, c’est comme un enfant – dont j’ai du mal à me séparer – que je veux faire grandir – qui prend son envol sans moi. »

Vous comprenez peut-être mieux mon aveu désormais. Alors voici le contexte de cet abandon.

Il y a quelques jours, pour briser les chaines tenaces de l’anonymat, j’ai abandonné toris de mes enfants – de si jeunes enfants, ils ne savent pas encore marcher – sur deux places publiques, à Bruxelles. A Uccle précisément. Dans des book boxes. Je n’ai pensé qu’à moi, je l’admets, qu’à tous ces lecteurs potentiels qui ne demandaient qu’à me découvrir. Je savais, en marchant, que ces livres-là – mes enfants ! – je ne les reverrais jamais. Je les abandonnais. Consciemment. Avec quelques remords. Mais je les abandonnais quand même. J’ai ouvert la porte vitrée de la boite, je les ai déposés, l’endroit était peu accueillant pourtant et leurs compagnons de cellule n’avaient guère bonne mine, mais j’ai refermé la porte et je ne me suis jamais retourné. Ce matin, un peu anxieux, je suis allé jeté un oeil. Ils n’étaient plus dans ces book boxes. Ils se trouvent dans des foyers confortables me suis-je rassuré. Ils voyagent. J’espère qu’ils ne feront jamais de mauvaise rencontre. Personne n’a encore retrouvé leur corps gisant près d’une bouche de métro. J’espère que je ne les reverrai jamais. Ou alors plus tard, beaucoup plus tard.

Quoi qu’il en soit, si vous les croisez, n’hésitez pas à me donner des nouvelles, ici ou sur le site bookcrossing.com, je les ai inscrits, ils sont estampillés d’un code. Ca apaisait ma conscience et ça multipliait les chances d’avoir de leurs nouvelles. Je suis un père poule.

Et pourtant, j’ai abandonné trois de mes enfants.

 

 

 

 

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