A quoi sert la littérature ? J’ai (enfin) une réponse

C’est la question un peu bateau, un peu pompeuse aussi qui agitent les grands esprits et les modérateurs en manque d’inspiration. J’ai souvent bredouillé pour combler le silence, au fond c’était pour ça que j’étais là, parler. Et je n’étais même pas payé pour le faire. Mais bon, je suis généralement sympatyhique et j’ai de l’empathie pour le modérateur, les trois pelés qui baillent à trois mètres de moi et ça me semblait être un bon exercice (au cas où, plus tard).

A quoi sert la littérature ?

Je n’en aucune idée. A quoi sert la littérature, quel est le rôle de littérature, que dit-elle de notre civilasation bla bla bla.

Et puis, ces derniers jours : l’illumination. Je parlais avec un homme de 70 ans qui ne consomme jamais de littérature. Et en général très peu de fiction. Il est né en Afrique, vit depuis 50 ans en Allemagne et malgré tout il a gardé toute sa vie ce dédain pour la fiction. A quoi bon écouter les histoires de gens qui n’existent pas ? Et puis lire ne l’intéresse pas, il préfère transmettre et écouter les histoires orales. Mais toujours les histoires de gens qui ont vu les gens qui ont vu l’ours. Rien de fabriqué. Rien de « faux » ou d’inventé. Pour quoi faire ?

Et puis sa femme s’est mis à raconter une vieille histoire où son père à lui était fâché que deux petites filles jolies habillées de la même manière soient comparées à deux soeurs. Mon homme de 70 ans était donc là, face à moi, en train de s’agiter sur sa femme parce que je « ne pouvais pas comprendre ».

J’étais surpris. Un peu irrité, peut-être. Et puis c’est là que ça m’a sauté aux yeux. La littérature c’est d’abord ça, se mettre dans la peau de personnages qu’on ne sera jamais, un vieil Erythréen né en 1920 devant la mer Rouge, être une petite femme russe amoureuse au XVIII ème à Saint Pertersbourg ou un agité du bocal à San Francisco aujourd’hui. La littérature ce n’est que ça : à moi seul, bien des personnages disait John Irving.

Lui, ne le savait pas. Lui il me voyait comme un type blanc de 2025, coincé dans sa religion (inexistante), limité par son job et son environnement géographico-économico-social (même s’il a beaucoup changé). Je ne pouvais pas voir, encore moins comprendre, le comportement d’un vieil homme noir, la tête pleine de croyances, de traditions, le fruit d’une très longue histoire.

Voilà. J’ai ma réponse à la prochaine session de questions par un modérateur fatigué.

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